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Jeu du mimétisme  [5]

L’ANALOGIE DU PAPILLON :

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à travers ses mutations, son envol et son vol,

son orientation et sa perpétuelle recherche d’équilibre

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« Quel évolutionniste irait supposer quelque rapport que ce soit entre la chenille

et le papillon, si l’on ne savait que c’est précisément le même être. »   [André Gide]

Papillon 01 couleur 02.png

Au moment même où la chenille pensa que le monde était fini, elle se transforma en papillon et s’envola.

 

La chenille se transforme en chrysalide, puis elle se métamorphose en papillon. Ce dernier, appelé imago, émerge délicatement de son cocon, déploie ses ailes et se prépare à prendre son envol. Doté d’ailes imposantes proportionnellement au reste de son corps, et ô combien fines et fragiles, nous pouvons nous demander : comment fait-il pour se propulser dans les airs et voler ? Au regard des équations de l’aérodynamique, telles que nous les connaissons aujourd’hui, le papillon ne devrait même pas parvenir à décoller ! Comment fait-il donc ?

Pour réussir à s’envoler, les papillons ont besoin d’augmenter leur température corporelle. Pour faire cela, le papillon nocturne fait vibrer ses ailes imposantes ; ainsi il réunit et canalise l’énergie intérieure nécessaire à son envol. Quant au papillon diurne, il capte la chaleur du soleil et en fait usage ; ainsi il s’aide d’une énergie extérieure et, qui plus est, inépuisable. En somme, tous deux font le plein d’énergie avant le décollage. Lors du décollage, le papillon plaque ses deux grandes ailes l’une contre l’autre à la verticale. De la sorte, il chasse brutalement l’air ; il fait le vide. Aussitôt l’insecte les rouvre rapidement en pivotant de façon à ce que l’afflux d’air entre les ailes accroisse la force ascensionnelle. De part cette succession de mouvements, il s’ouvre, crée l’élan de départ et s’élève. L’énergie du tourbillon engendré par le premier battement d’ailes est récupérée, puis mise à profit par le battement suivant, et ainsi de suite. En des termes plus techniques, le premier battement d’ailes provoque dans un sillage une turbulence de l’air, autrement dit une force générée, dont une partie est réutilisée dans un mouvement retour, de manière à augmenter sa portance, son aspiration et son élévation. Cela s’appelle des « captures de sillages ».

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Une fois le décollage opéré, le papillon vole au gré d’une dynamique de mouvements nécessairement combinés les uns aux autres, c’est-à-dire d’expérience en expérience. Chaque nouvelle expérience, de même que chaque nouveau ressenti, que chaque nouvelle impulsion ou action, repose sur l’expérience précédente, sur l’enchainement des expériences antérieures et sur l’héritage mémoriel ou le patrimoine culturel et génétique inscrit dans le corps et l’esprit. Chaque nouvelle expérience s’inspire du vécu passé et prend appui sur les enseignements tirés de chaque expérience écoulée. Comme l’enfant grandit petit à petit, puis évolue graduellement à l’âge adulte, comme le chemin se fait pas à pas, comme une idée se déploie progressivement et se concrétise en s’associant à d’autres idées, le vol du papillon s’opère par la succession de battements d’ailes. Ce phénomène illustre la théorie de la bicyclette de Noam Chomsky : "tant que vous continuez à rouler, vous ne tombez pas » [The New York Times, Sam Tanenhaus, 31-10-2016]. Et rouler nécessite une régularité de coups de pédales, comme voler nécessite une régularité de battements d’ailes. Dès lors, chaque avancée donne un élan à la suivante et la détermine. Chaque nouveau pas repose sur le précédent. Au sein de l’environnement naturel, toutes les actions sont forcément coordonnées les unes aux autres. Il en est ainsi de toute forme d’évolution.

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De plus, le rythme de battement d’ailes du papillon est relativement lent : en moyenne 10 mouvements par seconde. En comparaison, l’abeille bat des ailes environ 200 fois par seconde. De par sa cadence et son allure, le papillon ajuste ses postures et orientations, ses inclinaisons et rotations. La forme de son vol montre comment la posture du corps, associée à la lenteur du mouvement, guident la trajectoire et permettent le déplacement ajusté, cadencé et en relatif équilibre. En perpétuel ajustement, le papillon est donc imprévisible et très réactif. Ainsi, il peut notamment s’adapter aux variations des vents, de même que déjouer les menaces et attaques de ses prédateurs.

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Enfin, le papillon s’oriente en fonction de ses perceptions sensibles. De jour, la vue prédomine : ses yeux, composés de milliers d’unités optiques, perçoivent l’environnement sous la forme d’une mosaïque complexe et détaillée. De nuit, il rythme, règle et maintient sa trajectoire en se repérant à la position de la lune ou en se guidant grâce au parfum distillé par les plantes à floraison nocturne.

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Certains voient en cet insecte mutant et déambulant en zigzag, une authentique forme d’élégance. D’autres voient en cet être de la nature, une inspiration pour s’élever, se déployer et s’épanouir.

Vol du Bourdon.jpg

Des potentiels énigmatiques, et néanmoins inspirants

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Disposer de grandes ailes et d’un petit corps, comme pour le papillon, semble rendre impossible son vol et son envol. Pourtant il décolle et vol. Il en va de même pour le bourdon qui dispose des caractéristiques inverses : de petites ailes et d’un corps imposant. En effet, comme le rapporte Igor Sikorsky, pionnier de l’aviation, « Le rapport mathématique entre les ailes et le poids du bourdon nous démontre que voler lui est impossible, mais le bourdon l’ignore, c’est pourquoi il vole ».

La nature est surprenante et mystérieuse. Elle est une source inépuisable d’inspiration.

Bien que nous ne la comprenions pas toujours bien, elle nous influence et nous anime.

Elle nous procure le courage et la force nécessaires pour s’élancer, pour agir et avancer.

Sachant que le pouvoir inscrit en chaque être –comme en chaque élément de la nature– demeure infini, gardons espoir en nos facultés ignorées et en nos potentiels insoupçonnés. Afin de les découvrir et les déployer, expérimentons avec foi et désir, courage et prudence, patience et persévérance, comme un enfant apprend à marcher. Explorons de nouvelles voies, choisissons et faisons autrement, créons et ajustons-nous sans cesse, transformons-nous parfois.

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* « Avoir la foi, c’est monter la première marche même quand on ne voit pas tout l’escalier » – Martin Luther King.

 

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